Benoît Michaux, président du groupe Mentor : le businessman sans blues

À la tête du groupe Mentor, qu’il a fondé il y a 25 ans, Benoît Michaux continue d’imprimer l’envie d’entreprendre aux sociétés qu’il détecte, soutient et lance. Avec 2 400 salariés, sa holding s’étend de l’immobilier à la finance, jusqu’à la pizza et l’hydrogène. Dans toutes les directions, mais avec un sens unique : détecter des besoins et y répondre.
En arrivant sur les hauteurs de Nancy, à Dommartemont au siège du groupe Mentor, la belle villa fait impression. Non, elle impressionne. Une villa californienne en Lorraine, avec sa piscine et ses œuvres d’art. On y passerait ses vacances, lui y travaille avec une partie de ses collaborateurs. « Je ne cache pas ma réussite, explique le barbu décontracté, sans cravate ni veste. Mais je n’aime pas m’étaler non plus. Je suis à l’aise, comme ça, en vous rencontrant comme aujourd’hui, en petit comité. Je le suis beaucoup moins dans les cérémonies officielles, les grandes réunions. C’est pour ça que je ne fais partie d’aucun cercle ou association. »
Ils sont pourtant nombreux à tenter d’approcher celui qui est devenu une des figures de proue de l’entrepreneuriat en Lorraine. Depuis 1998, date à laquelle il décide de baptiser son entreprise Mentor, Benoît Michaux s’est spécialisé dans la détection de sociétés qui se lancent et leur apporte tout l’environnement pour réussir et se développer rapidement. Parfois même de l’argent, en investissant directement. « C’était peut-être un peu prétentieux au départ mais je savais que je pouvais apporter quelque chose à ces personnes qui souhaitaient se lancer, raconte Benoît Michaux. Après avoir plutôt réussi mon début de carrière dans l’immobilier puis la finance, le concept de Mentor m’est apparu comme étant assez clair. » Récemment, afin d’accompagner son développement toujours plus important, le groupe Mentor a réévalué significativement son capital social il y a quelques semaines, celui-ci passant de 19 à 500 millions d’euros afin d’accélérer son développement à l’international. Après plus de 25 ans à jouer les mentors, il sourit quand il entend les jeunes qu’il encadre lui dire : « Quand tu expliques, ça à l’air simple ».
Simple comme un bon investissement
C’est vrai qu’à l’écouter, réussir en affaires ne semble pas si compliqué que ça. Enfant, Benoît Michaux s’ennuyait sur les bancs de l’école puis ceux du lycée. Titulaire d’un CAP de géomètre, il s’ennuie au travail. Commercial chez Essilor pour son premier job bien payé, il s’ennuie également. « Je me suis dit, bon, il n’y a plus qu’une solution, te lancer toi-même dans un business. » De ce début de carrière presque en autodidacte, il se souvient que l’envie d’entreprendre ne vient pas que du cerveau, mais aussi du ventre. Une qualité qu’il essaie aujourd’hui de détecter chez les entrepreneurs qui viennent frapper à sa porte : « Il nous arrive quasiment un projet par jour, nous sommes obligés de faire un tri. Mais on étudie, on écoute. Au total, nous travaillons autour d’une trentaine de métiers. Historiquement plutôt l’immobilier et la finance, mais de plus en plus la food tech ou la santé. » Malgré une centaine d’entreprises dans son giron, le groupe Mentor garde quand même une logique en termes d’investissement, que son fondateur résume ainsi : « À chaque fois, nous essayons de répondre à un besoin des particuliers, parfois élémentaire, comme se loger pour l’immobilier, se nourrir, pour les pizzas par exemple. »
Les pizzas de la réussite
Ce dernier exemple est emblématique de la méthode Michaux. Il y a sept ans, une PME de Pompey qui emploie trois personnes attire l’attention de Benoît Michaux. Apitech est spécialisée dans les distributeurs automatiques de pizzas, un business balbutiant à l’époque. « Quand on cherche un marché chez Mentor, on cherche toujours un marché grand public. J’ai toujours regardé du côté de la pizza. Elle est partout, au supermarché, au restaurant, en livraison. Mais il manquait un créneau : personne ne maîtrisait la ligne de fabrication sur sa totalité, et surtout, accessible pour tous, y compris ceux qui habitent à la campagne et qui peuvent désormais prétendre manger une pizza chaude et de qualité. » Adossée depuis au groupe Mentor, Apitech emploie aujourd’hui 600 personnes et bientôt trois à quatre fois plus à l’international. C’est le fils aîné de Benoît Michaux, Loïc qui est à la direction commerciale de cette société, un des fleurons du groupe. Son frère Pierre a pris les rênes opérationnelles du groupe Mentor en tant que directeur général. Benoît Michaux ne cache pas son plaisir de voir deux de ses fils reprendre le flambeau, de façon officielle depuis 2022 : « Si ça n’avait pas été le cas, on aurait trouvé une autre solution, mais ce scénario, en forme de saga me convient tout à fait. »
Transmettre et former
Les projets ne s’arrêtent jamais autour de Benoît Michaux. Dans les cartons, en vrac, des activités variées dans le domaine de la santé, comme l’effacement des tatouages par laser : « Il y a de plus en plus de personnes tatouées. Il y aura de plus en plus de personnes qui souhaiteront se débarrasser de leur tatouage », indique l’entrepreneur, comme si c’était une évidence à laquelle on aurait dû penser. Récemment, le groupe Mentor a annoncé des investissements dans le secteur porteur de l’hydrogène. Enfin, le secteur de la formation tient particulièrement à cœur à Benoît Michaux. Avec le Mentor Institut, lancé début 2023, des formations de courtes ou moyennes durées sont déjà proposées. À terme, Benoît Michaux aimerait former les jeunes dans un cursus d’un an pour simplement « devenir entrepreneur », en distillant ses conseils personnels. « Une sorte d’école de commerce, à la sauce Michaux, poursuit-il. Où l’on apprend enfin comment décrocher son téléphone et convaincre un client. Avec le bon ton, la bonne méthode. Des choses simples, des détails à mes yeux incontournables, qu’on enseigne mal aujourd’hui. »
Et question détail, Benoît Michaux est un spécialiste. Dans sa carrière comme dans son environnement, rien ne relève du hasard. Organisé, limite maniaque, il avoue avoir lustré la table en verre de son bureau avant notre entretien : « Vous avez remarqué cette table ? Elle n’est pas rectangle pour que nous ne soyons pas vraiment face à face. Elle n’a pas d’angle, que des lignes courbes. Nous avons les mêmes sièges pour être égal à égal. À travers la transparence de son verre, on peut tout observer, le moindre signe de nervosité. On est un peu à nu. Vous voyez, rien n’est laissé au hasard… » sourit-il, en conclusion de ce qui pourrait être ma première leçon de la technique business à la sauce Michaux.